La maison diptyque a souhaité porter hommage à ses origines pour ses soixante ans. Elle a reconstitué l’atmosphère de ses débuts, qui remontent aux débuts des années 60 dans le Quartier Latin de Paris, avec un impératif majeur : puisque personne n’a plus mémoire des lieux, il fallait les réinventer. Orphéon est un songe olfactif.

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Olivier Pescheux, ami fidèle, a composé sa formule de cette nouvelle fragrance, nommée Orphéon, comme un tableau. L’espace lui-même, où domine le bois : tables basses, fauteuils, étagères du comptoir, alignant, on le suppose, les bouteilles et les bacs à glace, parquet de la piste de danse au sous-sol (cèdre, vétyver, patchouli). Les boissons, avec la note pointue des baies de genièvre évoquant l’alcool anglais que l’on sert en long drink avec une lamelle de citron italien et une larme de mandarine verte (manière de gin fizz ?), quelques glaçons. Le tabac qui, certains soirs, devait former une sorte de fog dont personne ne s’offusquait est figuré par les accents âcres du lentisque et du galbanum, mais aussi par ceux, bien plus suaves, de la brèche d’abeilles et du ciste, comme les bons cigares ou l’Amsterdamer à pipe.

Le parfum des femmes, fleuri ou poudré mais toujours du genre étoffé, ylang-ylang des Comores, magnolia de Chine, damascena turque. Plus l’indispensable imprévu disruptif : une splendide et vibrante absolue de jasmin sambac, comme un rouge à lèvres qui éclate dans la pénombre… Les hommes, un peu dandys souvent dragueurs, qui sentent le musc ou l’ambre (mais aussi la cigarette). Enfin l’éclairage qui ponctue le décor : rouge tamisé, chaleureux, sur un accord de fève tonka vénézuélienne et de benjoin laotien vanillé. De l’ambroxan en overdose : addiction sans
danger sinon sans vertige… En quatre mots : frais, floral, sensuel, boisé. Et non genré, bien sûr.

Gianpaolo Pagni, plasticien italien parisien d’adoption, a lui aussi choisi de dessiner comme on raconte une histoire. Côté face, au centre de l’ovale, une interprétation des esquisses pour ces tissus qui constituaient la vocation originelle des nos artistes réunis. Des formes décalées comme par effet d’optique et prises dans les rayons lumineux que reflète encore le seul vestige d’Orphéon : un pilier à facettes stroboscopiques debout désormais en bonne place dans la boutique du 34. Esprit de la fête. Au verso, la relecture d’un motif historique : trois profils différents mais juxtaposés en trois variations de gris dont on se plait à penser qu’ils représentent Desmond, Christiane et Yves (les trois fondateurs de diptyque) et leur prolifique association désormais disséminée tout autour de la terre.

Orphéon est donc, comme toujours chez diptyque, une partition à trois temps (la Maison, le parfumeur, l’illustrateur). Et ça fait soixante ans que ça dure !

Eau de parfum orphéon 75 ml – 135€

www.diptyqueparis.com