« Le talent tu l’as. Le reste, je m’en occupe ».

Cette phrase que Pierre Bergé dit à Yves Saint-Laurent dans une scène du film, il aurait aussi pu la dire à Jalil Lespert alors qu’ils se rencontraient pour la première fois. Cependant, si Pierre Bergé s’est assurément occupé de tout pour que le projet aboutisse, il n’est cependant pas sûr que le talent ait été du côté du cinéaste.

Le film s’attache à raconter la naissance du couturier Saint-Laurent alors qu’il entre comme directeur artistique chez Dior ; puis sa rencontre avec celui qui deviendra son mentor et son compagnon ; ses succès et ses déboires personnels, enfin. Mais à défaut de saisir la grandeur du personnage – grandeur que l’on attend autant dans ses inspirations que dans ses excès, le film se contente d’enregistrer, sans relief et sans panache, le déroulé d’une vie qui, ici, s’arrête en 1976 sans que l’on ne comprenne trop pourquoi.

Évidemment il y a Pierre Niney et Guillaume Gallienne, comédiens exceptionnels. Évidemment il y a les robes, sublimes et toutes prêtées par la Fondation Pierre Bergé. Il y a les lieux de vie du couple aussi, à Paris et à Marrakech, décors rendus possible par l’adoubement du film par ce même Pierre Bergé. Mais qu’en est-il de l’émotion née de l’inextricable complexité du personnage ? On assiste à une biographie officielle qui n’arrive pas à nous faire saisir les méandres de son génie, ni à comprendre ce que pouvait avoir de tragique sa relation avec celui qui devait partager sa vie.

En définitive, nous voulions sortir de la salle de cinéma fascinés par la grandeur et la part d’ombre d’un couturier-star, indispensable créateur de mode du XXème siècle. Nous sommes ressortis abasourdis par la platitude et le conformisme d’un film qui n’a aucunement la tenue des vêtements qu’il dévoile.

Quentin GUISGAND